Le Moniteur – Panorama de droit de la construction – Cour de cassation – Premier semestre 2020 — Karila

Le Moniteur – Panorama de droit de la construction – Cour de cassation – Premier semestre 2020

Marches privés : six mois de droit de la construction

Sélection des décisions les plus instructives rendues par la Cour de Cassation au premier semestre 2020. 

Par Laurent Karila
Avocat associé – Karila, Société d’avocats
Chargé d’enseignement à l’Université de Paris I Panthéon-Sorbonne

Le maître d’ouvrage peut-il à la fois obtenir réparation des manquements de l’entreprise et ne pas la payer pour les travaux exécutés ? L’architecte qui ne dissuade pas le maître d’ouvrage de choisir un constructeur placé en redressement judiciaire manque-t-il à son devoir de conseil ? L’assurance décennale couvre-t-elle les dommages immatériels ? La Cour de cassation a répondu à toutes ces questions, et à bien d’autres…

L’OUVRAGE, l’ELEMENT D’EQUIPEMENT ET LA RECEPTION

Notion d’ouvrage

La Cour énonce qu’« un enduit de façade, qui constitue un ouvrage lorsqu’il a une fonction d’étanchéité, ne constitue pas un élément d’équipement, même s’il a une fonction d’imperméabilisation, dès lors qu’il n’est pas destiné à fonctionner » (Cass. 3e civ., 13 février 2020, n° 19-10249, publié au Bulletin). Le dommage affectant l’enduit imperméabilisant relève donc de la responsabilité contractuelle de droit commun de l’entrepreneur, et non pas de la garantie décennale, puisque ledit enduit n’est qualifiable ni d’ouvrage, ni d’élément d’équipement.

La troisième chambre civile rappelle que l’éligibilité à la garantie décennale peut s’apprécier au regard de l’ensemble des travaux ayant fait l’objet du marché ; lesquels peuvent, certes non pas isolément, mais dans leur ensemble, constituer un ouvrage (Cass. 3e civ., 16 janvier 2020, n° 18-24948).

Réception tacite.

La Cour a eu – encore ! – à souligner le principe établi selon lequel l’achèvement de l’ouvrage n’est pas une condition de sa réception (Cass. 3e civ., 25 juin 2020, n° 19-15780).

 

LES GARANTIES LEGALES

Gravité décennale

Dans sa jurisprudence récente, la Cour de cassation a de nouveau contrôlé la motivation des décisions des juridictions du fond sur l’impropriété de l’ouvrage à sa destination – l’un des deux critères alternatifs de la gravité décennale. Elle casse ainsi l’arrêt de la cour d’appel qui a débouté un acquéreur de sa demande de condamnation au motif que les infiltrations localisées au plafond du séjour, d’importance modérée, n’obéraient pas l’occupation du logement, et que la difficulté rencontrée pour louer l’appartement ne résultait que des désordres affectant la pièce créée en cave. Et ce, alors qu’elle avait constaté que la récurrence des désordres et l’importance du taux d’humidité relevé par l’expert dans la pièce située en rez-de-jardin rendaient l’appartement – dont l’étanchéité n’était pas assurée – ainsi que la cave, qui n’avait pas vocation à être inondée, impropres à leur destination (Cass. 3e civ., 14 mai 2020, n° 19-10921).

La Cour de cassation valide l’approche de la cour d’appel qui avait qualifié un phénomène, généralisé sur toutes les toitures, de blanchiment et de déformation des ardoises artificielles, de dommage futur – objet de la responsabilité décennale des constructeurs – rendant un ensemble d’habitations impropres à leur destination. Ce désordre, qui s’était manifesté durant le délai d’épreuve de dix ans et était soumis à une évolution rapide et non susceptible de se stabiliser dans le temps, privait dans le délai décennal les couvertures de leur fonction d’étanchéité à l’air (Cass. 3e civ., 25 juin 2020, n° 19-15610).

 

RESPONSABILITE TOUS AZIMUTS

Réparation intégrale du dommage.

En indemnisant intégralement un maître d’ouvrage des conséquences des manquements de l’entreprise à ses obligations tout en le dispensant de payer le solde des travaux exécutés, la cour, qui a réparé deux fois le même préjudice, a violé le principe de réparation intégrale du dommage et l’article 1149 ancien (devenu 1231-2) du Code civil. Lequel énonce que « les dommages et intérêts dus au créancier sont, en général, de la perte qu’il a faite et du gain dont il a été privé […] » (Cass. 3e civ., 14 mai 2020, n° 19-16278 et 19-16279, Bull.).

Avant réception

La Cour précise qu’en l’absence de réception de l’ouvrage, le délai de prescription de l’action du maître d’ouvrage en responsabilité contractuelle du constructeur est de cinq ans. Et qu’en l’espèce, l’instance en référé n’ayant pas été introduite par le maître d’ouvrage, l’interruption puis la suspension de cette prescription ne lui profitent pas et que son action de droit commun était donc prescrite (Cass. 3e civ., 19 mars 2020, n° 19-13459, Bull.).

Garantie des vices cachés

Lorsque l’immeuble vendu est atteint de vices cachés nécessitant sa démolition, l’acquéreur qui a choisi de le conserver sans restitution de tout ou partie du prix de vente est fondé à obtenir du vendeur de mauvaise foi des dommages et intérêts équivalant au coût de sa démolition et de sa reconstruction (Cass. 3e civ., 30 janvier 2020, n° 19-10176, Bull.).

Il faut rappeler que la Cour de cassation présume de manière irréfragable (c’est-à-dire, sans que la preuve contraire puisse être apportée) le vendeur professionnel de mauvaise foi. Et que tous les travaux nécessaires à la disparition du vice peuvent donner lieu à remboursement, et ce même si leur coût dépasse le prix payé pour l’acquisition du bien, solution plus favorable à l’acquéreur poursuivant sur le fondement de l’article 1645 du Code civil (action en dommages et intérêts) plutôt que sur celui de l’article 1644 (action estimatoire devant correspondre à une réduction du prix de vente qui est parfois difficile à évaluer) [arrêt précité].

Prescription

Le paiement d’acomptes constitue une reconnaissance, même partielle, que le débiteur fait du droit du créancier contre lequel il invoque la prescription. Cela entraîne donc pour la totalité de la créance un effet interruptif de la prescription quinquennale de droit commun, qui ne peut se fractionner, en application de l’article 2240 du Code civil (Cass. 3e civ., 14 mai 2020, n° 19-16210).

Par trois arrêts de principe attendus depuis la loi du 17 juin 2008 portant réforme de la prescription en matière civile, la Cour tranche en faveur de l’application du délai de prescription quinquennal de droit commun de l’article 2224 du Code civil, pour plusieurs types d’actions. Ainsi, les actions des coobligés entre eux (Cass. 3e civ., 16 janvier 2020, n° 18-25915, Bull.) et celles du tiers voisin contre les constructeurs (Cass. 3e civ., 16 janvier 2020, n° 16-24352, Bull.) et les sous-traitants (Cass. 3e civ., 16 janvier 2020, n° 18-21895, Bull.) sont toutes soumises à la prescription de droit commun, les délais décennal et biennal visés aux articles 1792-4-1, -2 et -3 du Code civil étant exclusivement applicables aux actions du maître d’ouvrage ou des personnes subrogées dans ses droits.

Responsabilité de droit commun

La troisième chambre civile rappelle que le constructeur n’est pas débiteur – après réception – d’une obligation de résultat à l’égard du maître d’ouvrage, mais d’une responsabilité pour faute prouvée en ce qui concerne les désordres dits « intermédiaires », c’est-à-dire n’engageant pas la responsabilité décennale (Cass. 3e civ., 16 janvier 2020, n° 18-22748).

Responsabilité à l’égard des tiers

Sur le fondement de la responsabilité délictuelle, le tiers à un contrat peut invoquer à l’égard du cocontractant un manquement contractuel dès lors que celui-ci lui a causé un dommage, sans que ledit tiers n’ait à démontrer une faute délictuelle dudit cocontractant distincte de ce manquement. La nouvelle affirmation de ce principe par l’assemblée plénière de la Cour dans un cadre étranger à notre matière (contrat d’alimentation en énergie [Cass. ass. plén., 13 janvier 2020, n° 17‑19963, Bull.]), mais qui trouve régulièrement à s’appliquer en droit de la construction depuis qu’il a été adopté par l’assemblée plénière en 2006 (Cass. ass. plén., 6 octobre 2006, n° 05‑13255, Bull.), met un terme aux positions divergentes adoptées dans certaines décisions (notamment, Cass. 3e civ., 18 mai 2017, n° 16-11203, Bull. et Cass. com. 18 janvier 2017, n° 14-18832, 14-16442, considérant que le seul manquement à une obligation contractuelle ne peut caractériser une faute délictuelle).

Responsabilité du Syndic

Il résultait du rapport d’expertise judiciaire que les désordres provenaient d’un phénomène de retrait-gonflement des terrains d’assise, argileux, à la faveur de venues d’eau, dues à des fuites dans les réseaux ou à une insuffisance du drain périphérique. La cour d’appel a donc pu, sans inversion de la charge de la preuve, ni dénaturation du rapport d’expertise et du règlement de copropriété, en déduire que ces désordres, résultant soit d’un défaut d’entretien des parties communes, soit d’un vice de construction, engageaient – en application de l’article 14 de la loi du 10 juillet 1965 sur la copropriété – la responsabilité du syndicat des copropriétaires qui n’a pas rapporté la preuve d’une cause exonératoire de sa responsabilité (Cass. 3e civ., 23 janvier 2020, n° 18-19359).

Responsabilité du maître d’œuvre

La Cour prononce un arrêt remarqué et magnanime sur les limites de l’obligation de vigilance du maître d’oeuvre quant à la solidité financière des entreprises qu’il recommande au maître d’ouvrage. La cour d’appel avait constaté que l’alinéa 2 de l’article G 3.5.2 du CCAG du contrat d’architecte prévoyait que « l’architecte déconseille le choix d’une entreprise si elle ne lui paraît pas présenter les garanties suffisantes », tandis que l’alinéa 3 du même article stipulait que « le maître de l’ouvrage s’assure de la bonne situation financière et juridique de l’entrepreneur susceptible d’être retenu pour réaliser tout ou partie des travaux ». Ayant relevé qu’il n’appartenait pas à l’architecte de vérifier la solvabilité des entreprises qu’il choisissait, elle a pu en déduire que celui-ci n’avait pas manqué à son devoir de conseil pour n’avoir pas dissuadé au maître d’ouvrage de choisir une entreprise placée en redressement judiciaire (Cass. 3e civ., 19 mars 2020, n° 18-25585, Bull.).

Troubles anormaux de voisinage

Deux arrêts de la Cour, le premier relatif au contrôleur technique (Cass. 3e civ., 19 mars 2020, n° 18-26360), le second au maître d’oeuvre (Cass. 3e civ., 14 mai 2020, n° 18-22564), rappellent que ceux-ci ne peuvent être tenus pour responsables de troubles anormaux de voisinage (glissement de terrain ou nuisances sonores) qu’à la condition, non satisfaite en l’espèce, que le trouble soit « en relation de cause directe avec la réalisation des missions qui leur ont été confiées ».

 

SOUS TRAITANCE

Nullité du contrat

En application de l’article 14 de la loi n° 75‑1334 du 31 décembre 1975, le contrat de sous-traitance est nul en l’absence de délivrance par l’entreprise d’une garantie de paiement au bénéfice du sous-traitant. Cette nullité, qui n’est pas régularisable en cours de contrat, permet au sous-traitant qui s’en prévaut de réclamer une indemnisation en contrepartie des prestations déjà exécutées. Son évaluation ne peut se fonder sur le montant du contrat, du fait de son annulation, mais sur le juste prix, souvent à la suite d’une expertise judiciaire, fixé sur la valeur des dépenses effectuées par le sous-traitant, sans que celle-ci puisse être diminuée en fonction de la valeur de l’ouvrage réellement construit. La Cour de cassation censure donc la cour d’appel pour s’être référée au protocole transactionnel conclu entre les parties avant le prononcé de la nullité et qui reflétait la valeur de l’ouvrage construit (Cass. 3e civ., 5 mars 2020, n° 19-16407).

 

MARCHES DE TRAVAUX

Intérêts moratoires

La norme NF P 03-001 (version 2000) portant CCAG applicable aux marchés privés de travaux de bâtiment, auquel était soumis le contrat, prévoit des intérêts pour retards de paiement au taux d’intérêt légal augmenté de sept points, après mise en demeure du maître d’ouvrage par lettre recommandée avec accusé de réception. La Cour décide que l’absence de la mise en demeure requise n’a pas pour conséquence, comme l’avait jugé la cour d’appel, de faire courir les intérêts au taux conventionnel à compter seulement de la délivrance de l’assignation en paiement, mais de rendre applicable le taux d’intérêt légal (Cass. 3e civ., 19 mars 2020, n° 18-25395). On rappellera que l’édition 2017 de ladite norme prévoit désormais une application de plein droit des intérêts conventionnels (au taux BCE + dix points, sauf disposition particulière ne pouvant toutefois fixer un taux inférieur à trois fois le taux d’intérêt légal), sans mise en demeure, s’alignant ainsi sur les dispositions de l’article L. 441-10, II du Code de commerce.

 

ASSURANCES

Action directe

L’action directe de la victime contre l’assureur de responsabilité, qui se prescrit par le même délai que son action contre le responsable, peut être prolongée au-delà de ce délai décennal « tant que l’assureur reste exposé au recours de son assuré », c’est-à-dire dans un délai de deux ans qui court à compter de la mise en cause en référé expertise de l’assuré par le tiers-victime titulaire de l’action directe (Cass. 3e civ., 19 mars 2020, n° 19-12800).

Activités déclarées

L’application du contrat d’assurance de responsabilité civile décennale (RCD) implique que le sinistre survienne à l’occasion de travaux entrant dans le cadre de l’activité déclarée par l’assuré. Si la déclaration d’activité vise « l’aménagement de combles et greniers selon le procédé Harnois », l’assureur pouvait valablement dénier sa garantie pour un chantier ne mettant pas en oeuvre ce procédé, ce dernier ne constituant pas une simple modalité d’exécution (parmi d’autres) de l’activité déclarée, mais cette activité elle-même (Cass. 3e civ., 16 janvier 2020, n° 18-22108, reprenant la solution déjà dégagée dans Cass. 3e civ., 30 janvier 2019, n° 17-31121, Bull.).

N’entre pas dans l’objet de la police d’assurance de l’architecte, l’assurance des risques liés au cumul – en violation de ses obligations déontologiques – de son activité d’architecte d’une part et de représentant d’une société assumant le rôle de constructeur réalisateur d’autre part (Cass. 3e civ., 16 janvier 2020, n° 18-25228).

Enfin, les activités déclarées de « maçonnerie, béton armé, structure et travaux courants » n’emportaient pas celle de couvreur, de sorte que l’assureur était fondé à opposer un refus de garantie pour tous les désordres affectant la toiture et ceux qui résultaient directement des travaux réalisés en toiture (Cass. 3e civ., 5 mars 2020, n° 18-15164).

Attestations d’assurance

Le maître d’ouvrage dont le chantier est inachevé et abandonné par son entrepreneur s’est vu privé, par la faute de son assureur, de l’opportunité (offerte par l’article L. 111-28 du Code de la construction et de l’habitation) de résilier son marché en cours de travaux au motif de l’absence de justification de la souscription avant l’ouverture du chantier d’un contrat d’assurance couvrant l’entreprise au titre de sa RCD. Ledit assureur avait en effet délivré une attestation d’assurance, convainquant ainsi le maître d’ouvrage d’une souscription régulière. Or ladite police n’avait jamais pris effet, faute de paiement de la prime, et ce quand bien même ladite police n’avait pas pour objet de couvrir le sinistre déclaré. Le maître d’ouvrage pouvait donc réclamer à l’assureur des dommages-intérêts au titre de sa responsabilité délictuelle (Cass. 3e civ., 5 mars 2020, n° 19-13024).

L’assureur de responsabilité civile professionnelle est fondé – en application de l’article L. 112-6 du Code des assurances – à opposer aux tiers les clauses d’exclusion ou de limitation de garantie opposables à l’assuré, même si elles ne sont pas reproduites sur l’attestation d’assurance délivrée à ce dernier. La Cour casse donc l’arrêt d’appel qui avait retenu que le plafond de garantie mentionné sur l’attestation d’assurance était seul opposable aux tiers et ne pouvait être neutralisé par des stipulations plus restrictives de la police qui leur étaient inconnues (Cass. 3e civ., 13 février 2020, n° 19-11272).

Exclusion

La clause de l’acte de vente d’une maison, par laquelle les parties ont entendu « exclure tout recours contre quiconque de la part des acquéreurs concernant le raccordement au réseau d’assainissement », est réputée non écrite (en application de l’article 1792-5 du Code civil) puisqu’elle a pour objet d’exclure la garantie décennale des constructeurs (Cass. 3e civ., 19 mars 2020, n° 18-22983, Bull.).

Existants indivisibles

La cour d’appel, qui conclut que la charpente de l’ouvrage existant consolidée par différentes techniques de construction ne s’est pas trouvée totalement incorporée à l’ouvrage neuf et ne lui était pas devenue techniquement indivisible, a pu valablement dire que l’assureur RCD ne devait sa garantie que pour les travaux de reprise des désordres atteignant l’ouvrage neuf réalisé par son assuré, et non pas pour ceux affectant l’existant (Cass. 3e civ., 25 juin 2020, n° 19-15153).

Garantie

Si la responsabilité décennale d’un entrepreneur peut s’étendre aux dommages immatériels consécutifs aux dommages matériels de gravité décennale, l’assurance de cette responsabilité ne les couvre pas. L’assureur ne devait donc pas en l’espèce indemniser le maître d’ouvrage de son trouble de jouissance lié aux nombreux désordres, dès lors que la garantie complémentaire visant les dommages immatériels consécutifs n’avait pas été souscrite (Cass. 3e civ., 5 mars 2020, n° 18-15164).

Dommages ouvrage (DO)

La Cour rappelle qu’il incombe à l’assureur DO, « tenu d’une obligation de préfinancer les travaux de nature à remédier efficacement aux désordres, de rapporter la preuve de l’absence de lien de causalité entre son intervention et le dommage ». La cour d’appel a donc, à tort, inversé la charge de la preuve en rejetant la demande de condamnation de l’assureur DO au motif que l’expert amiable observe uniquement un léger mouvement de tassement dans la salle de bains, qui reste infime, et n’établit aucun lien entre ces désordres et les travaux de reprise préfinancés (Cass. 3e civ., 13 février 2020, n° 19-10713).

Le point de départ du délai de prescription biennale de l’action du garant de livraison, subrogé dans les droits du maître d’ouvrage, contre l’assureur DO, dans le cas de désordres survenus avant réception et de liquidation judiciaire de l’entreprise, est la date de l’événement donnant naissance à l’action. Cette date correspond à celle de l’ouverture de la procédure collective, emportant résiliation du contrat de louage d’ouvrage (Cass. 3e civ., 13 février 2020, n° 19-12281, Bull.).

 

EXPERTISE

Opposabilité du rapport

Hormis les cas où la loi en dispose autrement, le juge ne peut se fonder exclusivement sur une expertise non judiciaire réalisée à la demande de l’une des parties, peu important qu’elle l’ait été en présence de celles-ci. C’est en ce sens que la 3e chambre civile s’est prononcée en mai (Cass. 3e civ., 14 mai 2020, n° 19-16278 et 19-16279, Bull.), confirmant la jurisprudence de la chambre mixte de la Cour (Cass. ch. mixte, 28 septembre 2012, n° 11-18710, Bull.).

Le premier semestre 2020 donne cependant deux exemples de moyens susceptibles de pallier cette exclusivité. La Cour a ainsi énoncé que ne méconnaît pas les garanties du procès équitable, le juge qui se fonde sur un rapport d’expertise non judiciaire, soumis à la libre discussion des parties, dont il a souverainement apprécié la valeur probante lorsqu’il est corroboré par un plan d’arpentage dressé par un géomètre-expert (Cass. 3e civ., 26 mars 2020, n° 18-25939). Elle a aussi retenu que le juge ne peut pas refuser d’examiner un rapport établi unilatéralement à la demande d’une partie, aux fins d’une action en diminution du prix de vente engagée par l’acquéreur en raison d’un déficit de surface, dès lors qu’il est régulièrement versé aux débats, soumis à la discussion contradictoire et corroboré par d’autres éléments de preuve – en l’espèce, un autre rapport d’expert (Cass. 3e civ., 5 mars 2020, n° 19-13509, Bull.).

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