L’action directe est indifférente à la clause de conciliation du contrat de l’architecte — Karila

L’action directe est indifférente à la clause de conciliation du contrat de l’architecte

Action directe ; Recevabilité ; Condition ; Contrat conclu entre le maître d’ouvrage et l’architecte ; Clause prévoyant, en cas de conflit, la saisine préalable, par le maître d’ouvrage, de l’ordre des architectes ; Condition de recevabilité de l’action directe engagée contre l’assureur de l’architecte (non)

Cass. 3e civ., 10 nov. 2016, no15-25449, ECLI:FR:CCASS:2016:C301233

La saisine préalable, par le maître de l’ouvrage, du conseil de l’ordre des architectes aux fins de conciliation prévue dans un contrat le liant à l’architecte, n’est pas une condition de recevabilité de l’action directe du maître d’ouvrage contre l’assureur de l’architecte.


Les maîtres d’ouvrage se plaignant de désordres et non conformités affectant les carrelages réalisés dans le cadre de travaux de rénovation de leur habitation, exercent notamment une action directe à l’encontre de l’assureur du maître d’œuvre de l’opération.

Ledit assureur se prévalait de la clause de saisine préalable obligatoire du conseil de l’ordre des architectes insérée à l’acte d’engagement du maître d’œuvre sus visé pour conclure à l’irrecevabilité de l’action directe introduite à son encontre à raison d’une fin de non-recevoir pour défaut de droit à agir au sens de l’article 122 du Code de procédure civile.

Au considérant que la clause contractuelle d’avis préalable obligatoire de l’ordre des architectes constitue une fin de non-recevoir qui s’impose au juge d’une part ; que si elle est sans effet lorsque la responsabilité de l’architecte est recherchée sur le fondement d’une garantie légale des constructeurs, la responsabilité de l’architecte ne pouvait en l’espèce que relever de la responsabilité de droit commun en l’absence de réception des travaux d’autre part, la cour d’appel de Pau a fait droit au moyen d’irrecevabilité précité en confirmant la décision des premiers juges.

L’assureur de responsabilité de l’architecte formait un pourvoi au soutien duquel il concluait à la violation des articles L. 124-3 du Code des assurances, ensemble les articles 122 du Code de procédure civil et 1134 du Code civil, à raison de ce que « la victime d’un dommage dispose d’un droit propre sur l’indemnité d’assurance qui lui permet d’agir à l’encontre de l’assureur du responsable, au titre de l’action directe, même lorsque le responsable lui-même dispose d’une immunité » en sorte que ledit assureur considérait « que la saisine préalable de l’ordre des architectes par le maître de l’ouvrage, prévue au contrat le liant à l’architecte, n’est pas une condition de recevabilité de l’action directe engagée contre l’assureur de celui-ci ».

Faisant droit au moyen unique de l’assureur, la Cour de cassation casse l’arrêt d’appel, en énonçant « qu’en statuant ainsi, alors que la saisine préalable, par les maîtres de l’ouvrage, du conseil de l’ordre des architectes prévue dans un contrat les liant à l’architecte n’est pas une condition de recevabilité de l’action directe engagée par eux contre l’assureur de celui-ci » la cour d’appel avait violé l’article L. 123-4 du Code des assurances.

Ce faisant, cet arrêt – non publié – ne fait que reprendre la position de la Cour de cassation en la manière déjà énoncée par la troisième chambre civile le 18 décembre 2013 à l’occasion d’un arrêt publié au bulletin (Cass. 3e civ., 18 déc. 2016, n° 12-18439 : Bull. civ. III, n° 169 ; RGDA févr. 2014, p. 116, note Dessuet P. – RDI 2014, p. 105, note Boubli B.).

Cette position confirmée par l’arrêt commenté est cohérente avec l’orientation déjà ancienne de la Cour de cassation selon laquelle la mise en cause de l’assuré n’est pas une condition de recevabilité de l’action directe (Cass. 1re civ., 29 févr. 2000, n° 97-11811 : Bull. civ. I, n° 64 ; note Kullmann J. ; RGDA 2000, p. 1108 – Cass. 1re civ., 7 nov. 2000, n° 97-22582 : Bull. civ. I, n° 274 – Cass. 1re civ., 18 déc. 2001, n° 99-10298 – Cass. 1re civ., 15 mai 2002, n° 00-18541 : Bull. civ. III, n° 98 ; note Mayaux L., RGDA 2002, p. 747).

En effet, comment la Cour de cassation aurait-elle pu énoncer que le défaut de respect de la clause de conciliation obligatoire entre le maître d’ouvrage et l’architecte constituait une fin de non-recevoir à l’action directe alors que la mise en cause de l’architecte lui-même n’est pas une condition de la recevabilité de l’action directe ?

On relèvera qu’au cours de cette même année 2016, la même troisième chambre civile a eu l’occasion de préciser par un arrêt publié (Cass. 3e civ., 19 mai 2016, n° 15-14464, PB) que le moyen tiré du défaut de mise en œuvre d’une clause qui instituait une procédure de conciliation obligatoire et préalable à la saisine du juge, constituait une fin de non-recevoir à l’action du maître d’ouvrage à encontre de l’architecte responsable ; quand bien même les modalités de sa mise en œuvre ne soient assorties d’aucune précision.


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