Le vendeur en vefa était le seul assuré par le volet « responsabilité civile » de la Tous Risques Chantier (Cass. 3e civ., 22 oct. 2014) — Karila

Le vendeur en vefa était le seul assuré par le volet « responsabilité civile » de la Tous Risques Chantier (Cass. 3e civ., 22 oct. 2014)

L’assurance TRC n’est pas une assurance de dommages pour le compte de tous les participants à l’opération de construction, mais une assurance de choses d’une part, et de responsabilité d’autre part, ne bénéficiant qu’aux seuls assurés visés expressément dans les conditions particulières de la police.

Cass. 3e civ., 22 oct. 2014, n° 13-24834

FS-P+B

Par Laurent Karila

Avocat à la cour, barreau de Paris

Chargé d’enseignement à l’Université de Paris I

Il ressort de l’examen des termes de l’arrêt de la Cour d’appel de Paris du 15 mai 2013 (RG 09/16662) et de l’arrêt de la troisième chambre civile de la Cour de cassation -objet du présent commentaire-, qu’un Syndicat des copropriétaires et quelques copropriétaires acquéreurs en vente en l’état futur d’achèvement, ont sollicité la condamnation de leur vendeur maître d’ouvrage, la SCI Le Dôme, de la Mutuelle des architectes français (MAF), assureur TRC souscrite par ladite SCI, et du plombier, la Société ALLARD, aux montants utiles à la réparation de dommages matériels d’infiltrations survenus après la livraison mais avant réception de l’ouvrage, dont la cause avait -à dire d’expert-, été attribuée à faute audit plombier à raison de la rupture de manchons posés sur une canalisation encastrée dans la dalle entre deux logements qui se sont révélés inadaptées aux tuyauteries d’une part et à la réparation des dommages immatériels tenant à la privation de jouissance de leurs biens immobiliers par deux copropriétaires d’autre part.

A la demande des tiers victimes, les juges du fond condamneront in solidum la SCI (vendeur en VEFA), la MAF (assureur TRC) et la Société ALLARD (plombier fautif).

Les actions récursoires entre co-obligés in solidum étant tranchées et jugées par référence à :

  l’article 1.1.3 des conditions générales de la police TRC d’une part,

  et à l’article 2 des conditions particulières de ladite police d’autre part,

entraînant la garantie de l’assureur TRC MAF au seul profit du vendeur en VEFA, par ailleurs maître d’ouvrage, l’assureur TRC et son assurée étant relevés et garantis par le plombier fautif qui ne pouvait revendiquer la qualité d’assuré.

L’article 1.1.3 des conditions générales stipulait en effet que « la responsabilité civile de l’assuré à l’égard des tiers pendant la période d’exécution des travaux en raison des dommages corporels, matériels ou immatériels atteignant de façon soudaine ou imprévue les tiers, trouvant leur origine sur le chantier et imputables à la réalisation des ouvrages » d’une part, tandis l’article 2 des conditions particulières de la même police précisait que « pour la garantie responsabilité civile de l’article 1.13 des conditions générales, seul le maître d’ouvrage a la qualité d’assuré », d’autre part.

Le Société ALLARD introduisit alors un pourvoi devant la Cour de cassation au motif que « l’assurance tous risques chantiers est une assurance de dommages pour le compte de tous les participants à l’opération de construction ; que, partant, la cour d’appel ne pouvait condamner la société ALLARD, nécessairement couverte par cette police, à garantir la société MAF, prise en sa qualité d’assureur tous risques chantiers, quant aux condamnations prononcées à rencontre de ce dernière au profit des acquéreurs d’un immeuble vendu en l’état futur d’achèvement ; qu’en statuant comme elle l’a fait, la cour d’appel a violé l’article L. 112-1 du code des assurances », texte qui dispose que l’assurance pour compte d’une personne déterminée profite à la personne pour laquelle elle a été conclue, alors même que la rectification n’aurait lieu qu’après sinistre.

En la circonstance, la condamnation de l’assureur TRC était recherchée –avant réception sur le volet de « responsabilité civile » dont seul la SCI maître d’ouvrage était bénéficiaire, à l’exclusion de tout autre « assuré », de sorte que la Société ALLARD, locateur d’ouvrage à la faute duquel le sinistre avait été imputé, ne pouvait pertinemment prétendre à être garantie par l’assureur TRC et devait, en revanche, garantir celui-ci comme le maître d’ouvrage.

La Cour de cassation ne pouvait donc que rejeter le pourvoi en rappelant les termes limitatifs des conditions particulières.

Cass. 3e civ., 22 octobre 2014, no 13-24834

Publié au Bulletin

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l’arrêt suivant :

Sur le moyen unique du pourvoi provoqué :
Attendu, selon l’arrêt attaqué (Paris, 15 mai 2013), que la société civile immobilière Le Dôme (la SCI) a fait édifier une résidence composée de deux bâtiments, qu’elle a vendue en état futur d’achèvement ; qu’une police « tous risques chantier » a été souscrite auprès de la société Mutuelle des architectes français (la MAF) ; qu’est notamment intervenue à l’opération de construction la société Allard chargée du lot plomberie, assurée auprès des AGF ; que des dégâts des eaux étant survenus, le syndicat des copropriétaires et certains copropriétaires ont, après expertise, assigné les intervenants à l’acte de construire et leurs assureurs en indemnisation de leurs préjudices et que des appels en garantie ont été formés ;
Attendu que la société Allard fait grief à l’arrêt de la condamner, d’une part, à garantir la SCI et la MAF des condamnations prononcées au titre des préjudices immatériels, soit la somme de 30 000 euros à Mme Y… et celle de 15 000 euros aux époux Z…, que la société Allard devait régler in solidum avec la SCI et la MAF, celle-ci garantissant celle-là et, d’autre part, à garantir la MAF quant à la condamnation in solidum de la MAF assureur TRC et de la société Allard à payer à la SCI la somme de 29 296 euros au titre des préjudices matériels du logement Y…, la somme de 27 660 euros au titre des préjudices matériels du logement Z…, outre la somme de 44 519,47 euros au titre des préjudices immatériels réglée par la SCI, alors, selon le moyen, que l’assurance tous risques chantiers est une assurance de dommages pour le compte de tous les participants à l’opération de construction ; que, partant, la cour d’appel ne pouvait condamner la société Allard, nécessairement couverte par cette police, à garantir la MAF, prise en sa qualité d’assureur tous risques chantiers, quant aux condamnations prononcées à l’encontre de ce dernier au profit des acquéreurs d’un immeuble vendu en l’état futur d’achèvement ; qu’en statuant comme elle l’a fait, la cour d’appel a violé l’article L. 112-1 du code des assurances ;
Mais attendu qu’ayant relevé que l’article 2 des conditions particulières de la police « tous risques chantier » précisait que seul le maître de l’ouvrage avait la qualité d’assuré, la cour d’appel en a exactement déduit que la société Allard devait garantir la SCI et la MAF des condamnations prononcées au profit de Mme Y… et des époux Z… ;
D’où il suit que le moyen n’est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS
REJETTE le pourvoi


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